De père en fils...
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Je sais que je ne blogue plus de manière bien régulière, j’ai
la plume ailleurs…
Toutefois, cet après-midi le facteur m’apporte un
recommandé. Cela vient des impôts et sur l’entête, il y a les armoiries d’Espagne,
adoptées en 1981, après la transition démocratique. On y voit les blasons
séculaires de Navarre, de Castille, de Leon, de Aragon et Grenade, ainsi que
les armes de la famille royale : Les Bourbon-Anjou. C’est le même blason qui
est sur le drapeau espagnol.
J’ouvre la lettre, et lis que je suis dorénavant affiliée au
régime fiscal d’Espagne, et ce, par « Décret royal ». Et c’est ce
dernier mot qui me saute aux yeux.
Je n’avais pas pris la mesure que je vivais, désormais, dans
une monarchie !
Je savais que l’Espagne avait un roi, avec une couronne, une
reine, un sceptre, un trône et tous ces attributs qui me paraissent tellement surannés…
Mais voir écrit « Décret royal » me fait un choc.
L’Europe est encore tellement pétrie de traditions que l’on
considère souvent que la Reine d’Angleterre ou le roi des Belges, est là pour
le folklore, que, ma foi, ça participe au commerce extérieur, rapporte des devises
à la nation, et offre du conte de fées (le glamour), dans une époque bien
sombre.
En fait, il en est bien autre chose en Espagne.
La royauté a été rétablie à la mort de Franco en 1978, par l’accession
au trône de Juan-Carlos 1er. Il s’est marié à une princesse de Grèce
et a eu 3 enfants, dont le roi actuel Felipe IV. Vous me suivez ?
Celui-ci a épousé une roturière, divorcée, journaliste, et
célèbre présentatrice du journal télévisé espagnol, Laetizia Ortiz. Ils ont eu deux
filles, l’héritière Leonor, princesse des Asturies, et Sofia, l’infante. Celle
qui prendra le trône après son père sera l’ainée, sauf si un garçon arrive dans
la fratrie… (À quand le féminisme dans les cours d’Europe !)
Tous vivent dans un palais, à Madrid, le Zarzuela.
C’est pour la carte
postale.
Lorsque nous sommes arrivés, nous avons vécu notre première
crise, opposant les indépendantistes catalans, au pouvoir royal. Elle faisait
suite à la condamnation à des peines de prison ferme importantes, des membres
du gouvernement catalan, ayant participé à l’éphémère proclamation d’indépendance
de 2017.
Concomitamment, la petite princesse faisait son entrée dans
le « service » royal en faisant une tournée avec ses parents, pour
prononcer des discours. Elle est venue à Barcelone… la ville était bouclée et beaucoup
de Catalans manifestaient.
Et c’est à ce moment-là que l’image du fossé entre une
moitié de la Catalogne et le reste de l’Espagne m’est apparue si profonde. D’un
côté une jeunesse qui veut vivre en république et le crie dans les rues, et de
l’autre une jeune adolescente qui apprend son métier de future reine sous l’œil
tendre de ses parents.
Comment réconcilier ces deux visions de la société ? Souvent je peux lire dans les médias français, que c'est une histoire de gros sous, avec les uns ne voulant pas payer pour les autres... C'est beaucoup plus compliqué que cela, et restera une cicatrice à vif, dont chaque discours, chaque manifestation, chaque image glamour, ravive la douleur.
Le roi d'Espagne est le garant de l'unité du pays. Juan-Carlos a déjoué un coup d’état en 1981, et a transformé l'Espagne franquiste en une monarchie parlementaire pluri partisane et démocratique. Mais il a été rattrapé par des affaires de corruption qui ont terni son image et l'on poussé à abdiquer. Son fils a pour mission (avec le chef du gouvernement) de trouver un accord avec la Catalogne et le pays Basque... Est ce bien le travail d'un roi ? Ne serai ce pas plus audible s'il était le représentant élu issu du suffrage populaire, plutôt qu'un héritier, descendant de Louis XIV, avec toutes les représentations que cela implique ?
Cela ne me regarde pas, et ce ne sont là que quelques réflexions sur la société dans laquelle je passe... Mais en tant que bonne Française avec la révolution de 89 qui
coule dans ses veines, également citoyenne de la plus vieille République
fédérale d’Europe, la Suisse, vous devinez vers quoi mon cœur penche…
Je vais, tout de même, faire très attention à ce que j’écris, car qui dit
monarchie, dit crime de lèse-majesté, écrit à l’article 390.3 de la loi espagnole,
sanctionné de 2 ans de prison. Les caricaturistes d’un journal satirique avaientété condamnés, pour ce crime, à 3600 euros de dommages et intérêt…
Donc, déjà que le roi me fait payer, par sa royale décision,
des impôts pour sa cassette… je reste coite !